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Le projet fou de Mariton pour sauver l’UMP

Comment gagner les élections européennes ? Ou, plutôt, comment limiter la casse prévisible ? À l’UMP, on gamberge. Le député de la Drôme Hervé Mariton, en charge du projet du parti de Jean-François Copé, a plein d’idées. Pas sûr que ce soient les bonnes…

A l’UMP, Hervé Mariton est délégué général au projet. Comme Dominique Bussereau et Nadine Morano sont, chacun, délégué général aux élections. Signe que, quand mê­me, le projet est pris au sérieux, Mariton a deux adjoints : Valérie Debord, député de Meurthe-et-Moselle – et ennemie jurée de Nadine Morano, à tel point que lors du dernier conseil national de l’UMP, le 25 janvier, elles avaient été placées à deux tribunes séparées ! – et l’ancien villiériste Bruno Retailleau, sénateur de Vendée.
Fin janvier, à quatre mois des élections européennes, Hervé Mariton fait donc circuler ses idées qui, loin d’être une synthèse des travaux de son parti, sont celles produites par Droit au cœur, une association évidemment « humaniste » qu’il a fondée et qui intervient aussi sous le nom de Pont de la Con­corde. Faire figurer deux logos sur un papier à en-tête a l’avantage de faire croire qu’on est nombreux.

Vers l’abrogation des lois nationales ?
Les crânes d’œuf maritoniens ont donc pondu deux notes intitulées, l’une, « Comment les pays fondateurs de l’Europe peuvent-ils lui redonner de l’élan ? » – en voilà une question qu’elle est bonne… – et, l’autre, « Trois cercles pour donner une impulsion nouvelle à la construction européenne » – la géométrie au secours des politiques en somme. Au-delà de ces belles apparences technocratiques, le but est bien entendu de trouver le moyen d’endiguer la poussée FN. Et c’est là que c’est drôle.
Ce projet que Hervé Mariton a soumis aux parlementaires et aux dirigeants de l’UMP est un habile mélange de fédéralisme, ambition honnie par Marine Le Pen, et de coopération interétatique (mais de manière provisoire) sur fonds d’avancée sociale. En bref, il y en a pour tout le monde, les marinistes, les européistes et même les mélenchonistes ! Généralement, ça se termine toujours de la même façon : à vouloir faire plaisir à tout le monde, personne n’est content.
Droit à la Concorde et Pont du Cœur ou l’inverse, ayant conscience que l’U­nion européenne telle qu’elle existe ne donne pas satisfaction aux peuples européens, proposent tout bonnement de refonder l’Europe. Il s’agirait de constituer un noyau dur de six pays – un « Club des Six » qui ne doit rien à Enid Blyton – avec la France, l’Allemagne, l’Italie, les Pays-Bas, l’Espagne et la Belgique, soit, avec l’Espagne à la place du Luxembourg, le groupe des pays fondateurs de la Communauté européenne du charbon et de l’acier (Ceca) en 1952. Jusque-là, pourquoi pas, même si c’est d’assez mauvais augure si l’on se souvient que la Ceca a cessé d’exister, en 2002, quand l’Europe n’a quasiment plus eu de production de charbon ni d’acier…
Ce « premier cercle » formé, on pourrait alors s’attaquer à sa « gouvernance », via une « union politique intégrée » de ce Club des Six, avec un « format réduit » de tout ce qui existe actuellement et qui ne fonctionne pas : Parlement européen, Conseil européen et même une nouvelle Commission européenne ! Avec cette « avancée » supplémentaire que l’é­quipe de Mariton est fière de proposer : à terme, le droit des Six s’imposerait directement aux six pays, sans même que les parlements nationaux aient à se pro­noncer, comme c’est encore le cas, sur la transposition du droit européen dans le droit national ! On lit même dans la première note : « En outre, un effort de codification devrait être fait pour abroger les normes nationales dès lors que des normes à Six auraient été mises en place. »

« L’objectif est de recréer un véritable gauche/droite »
Au nom de la « rationalité économique », l’équipe de Mariton propose en­core, sous des vocables technos, la création d’un impôt européen – une question quand même jugée « sensible » – et le transfert à la nouvelle Union européenne qui ressemble à s’y méprendre à l’actuel­le, en pire, des prestations d’assurance-chômage et de celles liées à la santé, tandis qu’une partie de la TVA collectée dans chaque pays serait versée au budget commun ainsi que les cotisations so­ciales liées aux prestations transférées, une fraction de l’impôt sur les sociétés, etc. Les normes sociales seraient aussi harmonisées, ce qui est bien le moins dans ce cadre.
Le déficit démocratique – c’est com­me ça qu’on dit – de l’Union européenne n’ayant pas échappé aux maritonistes, ceux-ci ont trouvé le moyen pour que les citoyens de l’UE se sentent plus con­cernés par les élections européennes. Ils proposent que les députés européens soient élus, au moins dans le Club des Six, lors de scrutins par listes supranationales : il n’y aurait, dans tous les pays concernés, qu’une seule et même liste qui réunirait, au-delà de ce détail ringard qu’est leur nationalité, les députés de droite, une autre pour les députés de gau­che, une autre pour les écolos, etc. La deuxième note fait cet aveu : « L’objectif est de recréer un véritable gauche/droite pour repolitiser la vie politique européenne et faire qu’elle intéresse les citoyens. »
L’analyse qui est faite par les sous-traitants du « chargé du projet » de l’UMP est que si l’euroscepticisme gagne du terrain, c’est à cause de la transformation de l’UE en « ogre bureaucratique », ce qui est parfaitement exact. Là où ils se trompent, c’est quand ils estiment qu’un projet d’intégration européenne, y compris sur le plan de la défense, résoudra quoi que ce soit tant qu’il sera conçu, comme c’est le cas dans ces deux textes qu’Hervé Mariton qualifie d’« audacieux », dans un esprit centralisateur, unificateur et normatif.
Ce que Mariton oublie également, c’est que les têtes de listes de l’UMP aux élections européennes de mai prochain ont déjà été désignées. Et qu’il eût été préférable de définir le projet européen de l’UMP avant de choisir des têtes de listes qui, pour certaines, sont en total décalage avec ce beau program­me, ne serait-ce que pour des raisons électorales… 
Marc Bertric

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