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Ohé Steeve, tu bois ? Pierre Mauroy, un modèle pour le Front national !

Steeve Briois, élu du Nord-Pas-de-Calais, a rendu hommage à Pierre Mauroy. Mais il en a trop fait. Beaucoup trop. Le secrétaire général du FN est allé jusqu’à saluer la politique socialiste menée par Mauroy durant le premier septennat de François Mitterrand ! Au FN, c’est décidément à gauche toute…

D’abord on se pince. Ensuite on relit. Après on se repince. Il faut se rendre à l’évidence : le communiqué est bien de Steeve Briois (pho­to), ès qua­lités de secrétaire général du FN. « On ne peut que saluer aujourd’hui un engagement réel et sincère pour la défense des travailleurs français. Homme des 39 heures, de la retraite à 60 ans, des na­tionalisations dans des secteurs stratégi­ques tels que l’énergie et le secteur bancaire, Pierre Mauroy n’était pas soumis à l’ultralibéralisme et à la financiarisation à outrance. Il avait par ailleurs une profonde et salutaire estime de la notion d’Etat. » On imagine la tête de Le Pen… En 1984, un mois avant que Mauroy ne soit remercié, le Front na­tional réalise sa première percée na­tionale lors des élections européen­nes : 11,84 %. Précision qui doit être aujourd’hui apportée : à l’époque, le Front national est un parti de droite…
Et si Pierre Mauroy doit quitter Matignon en juillet 1984, c’est que, le 24 juin 1984, point culminant d’une mobilisation qui est montée crescendo, plus d’un million et demi de Français sont descendus dans la rue pour défendre l’école libre, à l’appel de l’Union nationale des associations de parents d’élèves (Unapel) et de l’enseignement catholique. Con­tre la volonté d’Alain Savary, mi­nistre de l’Education nationale, d’in­s­taurer un « grand service public unifié et laïc de l’Education nationale ». La mesure figurait dans les 110 propositions présentées par le candidat Mitterrand en 1981… Ça vous rappelle quelque chose ? Et ce 24 juin 1984, une semaine après avoir obtenu 11,84 %, Jean-Marie Le Pen, 56 ans, était dans la rue. Il n’avait pas craint de se mêler aux « cathos », lui…

Fonctionnaires et syndicats aux petits oignons
Le bilan des trois années de Pierre Mauroy à Matignon, ce fut un champ de ruines. Pas seulement, com­me en fait la réserve Briois dans la suite de son communiqué, pour ses positions « sur l’Europe et l’immigration ». La « casse sociale », comme on dit désormais au Front national, da­te de ces années-là. On parle alors de « restructuration ». Dans la sidérurgie, l’automobile, les charbonna­ges… Dans les chantiers navals aussi bien que la France dispose, comme le FN ne cesse de le noter, du deuxième espace maritime du monde…
On restructure… et on ment. Parce qu’il faut bien rassurer le po­pulo. Perle de Pierre Mauroy en date du 16 février 1983 : « Franchement, les gros problèmes sont derrière nous. La politique du gouvernement est fixée et, actuellement, pratiquement tous les indicateurs de la politique gouvernementale se remettent tranquillement au vert. »
L’année d’avant, la France a pas­sé le cap que François Mitterrand avait juré, durant sa campagne, qu’elle n’atteindrait pas, celui des deux millions de chômeurs. « Une France forte du travail de tous les siens », avait dit Mauroy dans son discours de politique générale…
Faut-il parler, aussi, de la criminelle refonte du statut de la fonction publique, confiée au ministre communiste Anicet Le Pors, qui, en ac­cord avec la CGT, l’a tellement étendu qu’il a fait passer les effectifs d’en­viron deux millions à près de cinq millions ? Ou des lois Auroux sur le travail, qui ont attribué une dotation minimale de fonctionnement aux comités d’entreprise sur la base de la masse salariale, fromage sur lequel se sont jetés les syndicats ? Ou de la volonté de Pierre Mauroy lui-même d’envoyer l’armée – oui, l’armée ! – pour briser une grève des chauffeurs routiers, lesquels ne du­rent leur salut qu’à l’intervention d’un autre ministre… communiste, ce­lui des Transports ?

L’avortement remboursé par la Sécurité sociale
En 2010, lorsque la énième réforme des retraites, présentée celle-là par Eric Woerth, vient en discussion au Parlement, le sénateur Mau­roy se leva pour lancer qu’il n’était pas question de repousser l’âge de dé­part à la retraite à 62 ans car sa fixation, par ses soins, à 60 ans, avait cons­titué « la loi la plus importante de la Ve République ». Tête, cette fois, de Robert Badinter… Mais bon, puis­que le Front national, par la voix de Steeve Briois, comme par celle de Marine Le Pen, s’accroche aux « 60 ans pour tous. »
Les années Mauroy, c’est la France socialiste. Avec tant de nationalisations – saluées par Briois – qu’en 1983, après deux ans de mitterrandisme, un Français sur quatre travail­le dans le secteur public. Toutes les banques y sont passées mais aus­si Saint-Gobain, Thomson, Rhône-Poulenc, Suez, etc. Fameux succès, dont l’onde de choc se propage en­core sous le nom d’affaire Tapie, une affaire née il y a plus de vingt ans dans les couloirs feutrés d’un Crédit lyonnais nationalisé en 1982.
C’est encore Yvette Roudy, mi­nistre des Droits de la femme, qui ins­taurera, en 1982 toujours, le remboursement de l’interruption volontaire de grossesse par la Sécurité so­ciale, comme si la grossesse était une maladie et l’avortement son remède ! C’est elle aussi qui, en 1983, fera adopter la première loi sur la parité. On en passe et des pires, comme l’accord gazier conclu par le ministre des Relations extérieures, Claude Cheysson, avec l’Algérie, au seul bé­néfice de celle-ci.
Contre tout cela, Jean-Marie Le Pen avait bataillé. Hélas, le Code ci­vil est formel : en matière de donations, « la révocation […] pour cause d’ingratitude n’aura jamais lieu de plein droit ». 
Marie Desgouët

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