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Ils arrivent, que faire ?

Jusque-là, on ne voyait que des bateaux surchargés avec, à leur bord, des masses sans autre apparence que celle de la masse, comme ces essaims en train de se former et dont on ne distingue pas les individus et que, d’instinct, on sent dangereux au point d’appeler les secours s’ils viennent à se constituer trop près des habitations. On disait les grappes humaines mais cela restait de l’ordre de la formule. Ce n’était pas des gens, c’était des immigrés, forcément porteurs de maladies et de désordres.
Et puis, soudain, la masse a pris figure humaine. Par le biais d’une photographie, elle s’est personnalisée en la figure d’un enfant, ou plutôt dans son corps, un enfant dont on nous a dit qu’il s’était détaché de cette masse à en mourir et s’était échoué, tel un cormoran après la marée noire, un enfant qui, la veille encore, avec l’insouciance de son âge et la confiance aveugle en ses parents, en la tendresse de sa mère, en la force de son père, devait rire, et jouer, et pleurer, sans avoir jamais eu seulement conscience qu’un jour, il serait mort lui aussi, sans avoir eu seulement conscience, sauf peut-être à l’instant fatal, de ce qu’est la mort…
L’émotion remplace la raison, certes, ou du moins elle la précède, mais comment


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  • Publié dans le numéro : 2736
  • Auteur : Marc Bertric

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