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Je t'explique...

J’en ai avalé mon croissant de travers. Il n’y pas à dire, le monde appartient à ceux qui osent tout. Dans « Le Mon­de » daté du 21 septembre, l’écrivain marocain Tahar Ben Jelloun signait un article sur « l’intolérance de l’islamisme », à la suite de l’affaire du film et des caricatures qui embrasent les pays mu­sulmans. Ode universaliste à l’individu et à la modernité bêlante, exigence de la démocratie partout, ici et maintenant : rien de nouveau sous le soleil. L’auteur est très pédago, un peu poussif. Son métier, c’est de courir les écoles pour « expliquer » aux enfants. Forcément, ça laisse des séquelles. Il adore expliquer, Tahar. Il explique tout. T’as un problème ? Demande à Tahar, il t’explique. D’ailleurs, il a pondu deux livres, L’islam expliqué aux enfants et Le racisme expliqué à ma fille. En at­tendant La démocratie expliquée à mon cheval et L’art de trouver le bon filon expliqué à mon éditeur.
Bref, exalté par de nobles sentiments et poussé par des considérations pénétrantes sur « les populations maintenues dans l’ignorance » (à qui il faut donc sans cesse expliquer), notre ami Tahar n’hésite pas à livrer le fond de sa pensée : « Nous sommes dans une démocratie où la liberté d’expression est sacrée ». C’est là que le croissant est resté coincé. Le même cochon, un mois auparavant, avait en effet sonné le début de la chasse à courre contre Richard Millet et son éloge littéraire d’Anders Breivik ! Un « texte insupportable » commis par un « raciste » qui n’avait pas sa place au comité de lecture de Gallimard ! « Il faut qu’il s’en aille », couinait-il dès le 28 août au micro de Pascale Clark ! J’en toucherai un mot à mon ami Antoine ! « La littérature ne doit pas être du côté des criminels et des salauds » ! La man­œuvre a d’ailleurs parfaitement réus­si. Millet a perdu son poste le 13 septembre. Quel sacré sens du sa­cré, ce Tahar ! Un peu plus et il ressortait en dégueulis, mon croissant ! Je préfère encore un barbu franc du collier à une fripouille de cette espèce.
« La liberté d’expression est sa­crée ! » C’est également l’argument avancé par la clique de dessinateurs binoclards de « Charlie Hebdo », tous plus ou moins mongoliens, et que défend Marine Le Pen (1), recouverte pourtant d’excréments toutes les semaines dans l’Hebdo rigolo !
A croire qu’elle aime ça


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  • Publié dans le numéro : 2582
  • Auteur : Julien Jauffret
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