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Frédéric Haziza s’écrase en plein vol

Il nous avait promis de grandes révélations. Au final, dans Vol au-dessus d’un nid de fachos (Fayard), Frédéric Haziza nous assène un ouvrage qui n’a rien d’une enquête mais tout d’une mauvaise compilation de (souvent) mauvaises infos, analysées à coups de préjugés.

Frédéric Haziza dirige depuis 2 011 le service politique de la ra­dio communautaire juive Radio J. En parallèle, il a en­tamé une carrière télévisuelle depuis 2003 sur La Chaîne parlementaire où il anime deux émissions hebdomadaires. C’est une polémique liée à ses fonctions sur cette chaîne qui est à l’origine de ce livre nous dit-il. En novembre 2012, il avait refusé d’inviter Alain Soral dans son émission, le qualifiant d’antisémite. En représailles, Soral avait mobilisé son puissant réseau (en particulier sur internet) pour orchestrer une mobilisation contre le journaliste, réclamant notamment son renvoi de la chaîne de télé publique.
Que la campagne contre le journaliste ait été odieuse en bien des points (Soral avait notamment mis en doute le fait que le grand-père de Frédéric Ha­ziza soit mort à Auschwitz), chacun en convient. Pour autant, cela ne saurait le dispenser d’un minimum de rigueur intellectuelle dans son travail, et là, on est très loin du compte. Les seules informations solides de l’ouvrage s’appuient sur des informations publiées ailleurs concernant la galaxie Dieudonné-Soral ou des mem­bres de l’entourage de Marine Le Pen. Pour le reste…
Par exemple, Frédéric Haziza démarre son chapitre intitulé « Ce que nous a appris La Manif pour tous » en écrivant : « Aujourd’hui, en France, on peut être antisémite, on peut être négationniste et le clamer haut et fort », ce qui est un brin décalé ! Un peu plus loin, il s’imagine que le débordement sur les Champs-Elysées du 24 mars 2013 a été prévu « de manière très politique, voire machiavélique : il s’agit de mettre les enfants en avant ».
Pour noircir des pages – il y consacre un plein chapitre –, Haziza ne s’embarrasse pas de crédibilité. Pour faire peur à la ménagère et au gentil républicain, il n’hésite pas à évoquer un potentiel coup d’Etat d’extrême droite fomenté par la revue mythomane « l’Arsenal » et son non moins fantasque rédacteur en chef ! « Est-il un activiste isolé ou le chef d’une organisation factieuse prête à passer à l’action ? Dispose-t-il de réseaux et d’appuis au sein de l’armée ? », se demande Haziza qui trouve finalement la réponse à ses interrogations an­xiogènes : la revue serait animée par « un petit groupe d’une vingtaine de personnes » Y compris les pseudonymes serions-nous tentés d’ajouter…
Dans ce domaine d’études, Frédric Haziza aurait dû laisser faire les grands. Car il y a des « spécialistes » qui con­naissent leur sujet. Côté droite nationale, il y a par exemple David Doucet, qui a publié une Histoire du Front national (Tallandier) très documentée, ou encore Nicolas Lebourg et Jean-Yves Ca­mus, qui ont dirigé un numéro spécial FN de « Charlie Hebdo » avec des analyses d’un autre calibre que le vol d’Haziza. Et pour ce qui est de l’analyse des mouvements sociaux droitiers, telle La Manif Pour Tous, on renverra volontiers ce dernier vers les travaux de Gaël Brustier, tout aussi gauchiste que clairvoyant.
Bref, la prochaine fois qu’il souhaitera écrire sur Dieudonné (et les autres), s’il ne veut pas se ridiculiser à nouveau, Haziza ferait mieux de se trouver un nègre. 
L. H.

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