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Sous surveillance

Le titre français du dernier film de Robert Redford est bienvenu : oui, nous vivons tous sous surveillance, c’est le premier constat qu’établit ce film sur le gauchisme, sa queue de co­mète, sa légende, ce film fait par de vieux gauchistes désenchantés qui essaient de se souvenir du passé sans jamais réussir à s’élever vraiment à la hauteur de ce que fut leur propre cause.
On pourra dire qu’à 76 ans, Redford joue les Belmondo poussifs sans vraiment convaincre. On pourra préférer le jeu de Susan Sarandon dans Thelma et Louise (1 991). Pourquoi jouer ainsi les prolongations ? En même temps – c’est l’histoire du verre à moitié vide qui est à moitié plein –, il faut bien reconnaître le formidable appétit de jouer qui anime Redford et l’extraordinaire rôle de composition dans lequel se retrouve Susan Sarandon.
Quant aux jeunes, emmenés par Shia La­Beouf en journaliste minable, prêt à tout pour ré­ussir, ils sont convaincants.
Au total, ce film, mine de rien nous entretient de la manière dont notre démocratie se transforme en dictature du consensus. Il évoque le poids des or­ganismes de contrôle et de la police politique (le FBI ici), il pointe le repentir des militants qui ou­blient leur jeunesse folle dans des cages dorées, il souligne la difficulté qu’il y a à prouver son innocen­ce quand les apparences sont contre vous. Bref, non seulement ce film est fait par des vieux, mais en plus ils se permettent de critiquer le joli temps dans le­quel ils ont fini par arriver.
Je peux comprendre qu’on leur en veuille. Ils sont de gauche, direz-vous peut-être… Ce qui les fait triper, c’est la guerre du Viêt-Nam et la résistance à la conscription ? Mais justement, cette résistance à la conscription, n’est-ce pas un vieux thème de droite, qui donna naissance jadis aux guerres de Vendée ?
On peut trouver aussi que sont  Antigone est fa­tiguée et qu’il est fatiguant de la voir jouer au papa et à la ma­man… Au moins Redford, sous les traits de Julie Christie, évoque-t-il cette figure jusqu’au-boutiste : elle est seule sur son bateau à dé­fier le monde entier… en oubliant sa fille. Voilà un personnage qui n’est pas si commun dans le cinéma américain. Et un film qui vaut le détour. Rien que pour elle. 
J. P.

Sous surveillance, un film de Robert Redford, avec Nick Nolte, Robert Redford, Shia LaBeouf, Susan Sarandon, 120 mn. En salles.

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