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Entretien avec Roland Chassain, maire UMP : « Il faut des passerelles entre l’UMP et le FN ! »

Lors des législatives de juin dernier, Roland Chassain, maire UMP des Saintes-Maries-de-la-mer, avait créé l’événement. Dans « Minute ». Il avait alors déclaré que pour faire battre le candidat socialiste, Michel Vauzelle, président du conseil régional il était prêt à se désister au profit de Valérie Laupies, candidate du RBM. Chassain avait tenu parole, Laupies avait tout de même été battue, mais cette alliance de circonstance avait fait grand bruit. Copé et Fillon avaient promis d’exclure le maire ! Six mois plus tard, Roland Chassain a toujours sa carte UMP. Et les menaces ne l’ont pas bâillonné. Pour sauver l’UMP, en état de décomposition avancée, il a lancé une pétition nationale pour que Sarkozy en devienne le super président et propose de dresser des passerelles entre l’UMP et le FN !

Minute : Pour sortir de la crise, l’UMP doit-elle organiser une nouvelle élection ?
Roland Chassain : Refaire une élection, c’est ouvrir de nouveaux conflits dans toutes les circonscriptions, entre tous les cadres du mouvement. Et dans 3 ans, car il faut rap­peler qu’un mandat de président de l’UMP ne dure que 3 ans, et pour les éventuelles primaires à la présidentielle de 2017, on risque de connaître les mêmes problèmes. A l’UMP, il faut en finir avec cette po­litique spectacle. Par leurs comportements, Jean-François Copé et François Fillon ont divisé les militants et perdu leur crédibilité. S’ils campent sur leurs positions, l’UMP va exploser, et à la prochaine présidentielle, ni l’un ni l’autre ne sera un candidat présentable. Pour rétablir la sérénité, il n’y en a qu’un…

C’est pourquoi vous avez lancé une pétition pour réclamer le retour aux affaires de… Nicolas Sarkozy !
Je souhaite effectivement que Nicolas Sarkozy devienne président d’honneur de l’UMP, un juge suprême, un arbitre au-dessus des di­vi­sions, qui impose à Fillon et Co­pé de travailler sous la même ban­nière, uniquement dans l’intérêt du parti. Il faut arrêter la guerre des petits chefs et remettre la machine en route, sur des sujets qui préoccupent les Français.

Sarkozy, le retour ! Vous y croyez vraiment ?
Pour moi, c’est le seul qui a la stature, les autres se sont discrédités… Il n’y a que Sarkozy pour fé­dérer, non seulement les divers courants au sein de l’UMP, mais aus­si tous les partis de droite. Je vous rappelle d’ailleurs que Copé avait promis que si Nicolas Sarkozy revenait, il se rangerait derrière lui. La moitié du chemin est donc faite. Reste à convaincre François Fil­lon de ne pas vouloir se ranger devant ou à côté.

Vous parlez de l’UMP… Pourtant, aux dernières législatives, vous avez été accusé de faire le jeu de Valérie Laupies, candidate du Rassemblement bleu Marine, et votre exclusion de l’UMP avait été annoncée…
Mettons les choses au point : je n’ai fait aucune alliance avec le FN ! Mon but, clairement affiché, c’était « tout sauf Vauzelle », le candidat so­cialiste. Fidèle à ma parole, je me suis donc désisté au second tour, pour battre Vauzelle ! Il a malheureusement été réélu, mais j’ai reçu des milliers de messages pour me féliciter de mon courage politique. Alors, il faut regarder les choses en face. Si on ne discute pas avec le FN, qui représente 6,4 millions d’é­lecteurs, la droite est condamnée à perdre, pour au moins 20 ans ! Je dis tout haut ce qu’à l’UMP beaucoup pensent tout bas. Il était donc extravagant d’imaginer que je puisse être exclu.

La prochaine échéance électorale, ce sont les municipales de 2 014. Pour vous, est-ce que ce sera une nouvelle fois, « Tout sauf la gauche ! » ?
Dans la perspective des municipales, il est impératif de dresser des passerelles avec le FN. Je ne parle pas d’accords, mais de discussions, en bonne intelligence. Il faut accepter que figurent sur les listes de l’UMP des personnes qui partagent les opinions du FN. Pour battre la gauche, un vrai rassemblement de toute la droite est nécessaire. Et pour cela, il faut discuter, écouter le peuple de droite.
Regardez Gilbert Collard, il n’a pas sa carte du FN, mais il a co-fondé l’association « Rassemblement bleu Marine », dont le but est de rassembler au-delà du FN.
Je partage sa vision des choses, je trouve ça très intelligent.

Vous allez vous attirer les foudres du politiquement correct…
Ras-le-bol des donneurs de le­çons ! Je vous raconte une anecdote : il y a 3 semaines, à Arles, j’ai, par ha­sard, rencontré Valérie Laupies, avec qui j’ai échangé quelques mots. Dès le lendemain, certains, qui se disent de l’UMP mais qu’on ne voit jamais sur le terrain quand il faut mouiller le maillot, ont, sur leurs blogs, imaginé et écrit que je préparais une alliance avec le FN !
Mais je suis quand même libre de discuter avec qui je veux ! N’est-on pas en démocratie ?
Au PS, ça ne les gêne pas de s’afficher avec l’extrême gauche, le Front de gauche ou le Parti anticapitaliste ! Dimanche dernier, Michel Vauzelle était l’invité du loto du Parti communiste. Et ça ne choque personne !

Sarkozy, dont vous réclamez le retour, n’a pourtant jamais voulu tendre la main au FN…
Lorsqu’il était venu aux Saintes-Maries en 2007, je lui avais dit qu’il ne fallait surtout pas décevoir les électeurs du FN… Et je le répète aujourd’hui !
Si, pendant la campagne 2012, Nicolas Sarkozy avait proposé l’arrivée d’un membre du FN dans son prochain gouvernement, il serait pas­sé ! Si, à une époque, les déclarations sulfureuses de Jean-Marie Le Pen rendaient le dialogue impossi­ble, aujourd’hui avec Marine Le Pen, c’est une nouvelle génération, que l’on ne peut pas ignorer. Ses 6,4 millions d’électeurs ne sont pas des pestiférés. Ils ont droit à ce que leurs idées soient représentées et défendues. 

Propos recueillis par Pierre Tanger

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